lundi 17 novembre 2014

Télémaque / 27 décembre 10h24mn



Objet : Re : La deuxième nuit



Jusques à quand supporterez-vous cet effeuillage intime ? Jusques à quand goûterais-je vos dévoilements ? Viendra sans doute un temps...
où mes supplications couvriront  mes murmures enamourés et où je voudrai joindre la chair aux mots. Vous-même trouverez vaines vos confessions. Mille et une nuits ! Allons donc ! Saurais-je, tel Shâhriar, retenir ma colère ? Saurez-vous, telle Shéhérazade, panser mes plaies de vos murmures, parer mes coups, prolonger l’ombre ?

A me conter ainsi vos amours passés, réelles ou imaginaires et à peupler mes rêves de vos amants magnifiques, vous allez faire de moi le spectateur de vos nuits anciennes, de vos émois, de votre attente palpitante. Je vous verrai à travers les yeux de ceux que vous avez séduits, ou qui vous ont prise. Je vous devinerai à travers les yeux de mes rivaux. D’aucuns jugeraient que vous vous défaussez mais vous m’offrez ainsi les masques que je voudrais porter pour mieux vous approcher. Vous faites le lit de mon voyeurisme. 

Vous risquez bien sûr de lasser mon attente. Viendra peut-être un temps où comme Sardanapale, assiégé, sans espoir,  je voudrai rompre les liens qui m’unissent à vous et tout détruire de ce qui aura fait notre bonheur fugace. Vous disparaitrez ce jour avec moi, fusion totale de nos inexistences. En acceptez-vous le présage ? Ce péril ne vous fait-il pas reculer ?

Mais me voilà morose et mélancolique avant l’heure. C’est que rien pour moi ne se départit jamais de son envers périssable, que je ne vois jamais la rose sans pressentir le pétale fané, la peau sans la ride qui la viendra meurtrir ou la veine qui bientôt y dessinera son relief. Allons ! Soyons plus gais et goûtons aujourd’hui. Carpe diem. Il sera temps demain d’incendier le palais, les ors, les eunuques et les esclaves. Poursuivez, Shéhérazade. Narrez vos nuits. Attisez le désir en moi d’être un autre, d’être cet autre qui vous enlace, ces autres qui vous ont aimée, laissé exsangue sur la rive après que la tempête vous eût défaite. Dites moi la tempête.

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