dimanche 16 novembre 2014

Shéhérazade / 25 décembre 23h59mn



Objet : La première nuit

Il se faisait tard et Shéhérazade était lasse. Aussi confia-t-elle à l'inconnu, mot-à-maux, cet extrait de son âme.

28 mars 2007

Au fond j’aime " ça". Ça doit dater de l’enfance. Pleurer un bon coup jusqu’à...
se vider l’âme, comme une bonne grosse pluie qui lave les jardins poussiéreux de nos vies. Plein de pleurs plein de pluie dans le cœur. Orage de mars dehors, qui fronce le ciel et secoue les derniers flocons de mimosa. Du souvenir ou de la cave ces senteurs de fleurs d’orangers ? Je cherche mes gammes sur le clavier. "Cherchez le cœur.. " Parlons de cœur. Je le tâte je le presse les yeux fermés pour écouter la voix ténue d’une ténue douleur pelotonnée dans un coin tel un chiot blessé. Tic tac, tic tac monotone d’une montre. En écho le chant noctambule d’une  cigale. J’ai dit non aux frères qui me sollicitent pour une réunion afin de parler encore de la succession du défunt Pharaon. Trop fatiguée trop meurtrie d’ensevelir à petit feu les traces fugaces des Rois Maudits dont je suis désormais orpheline. J’ai dit non. Dans ma caverne ce soir " Défense d’entrer, chien méchant ". Non, je ne mords pas je pleure et ça fait mal aux mâles les pleurs d’une femme. Alors je dis Non et je me penche sur mon âme je l’étale à ma guise sur une page banquise. Je hurle chante fredonne en silence dans l’immensité de ma solitude blanche. Des mots en moi qui germent fourmillent bourgeonnent me fendillent me rendent encore plus terre plus tendre. Naîtra-t-il enfin d’entre mes premières rides "l’enfant endormi" qui se niche dans mes entrailles depuis d’immémoriaux printemps ? Le cœur disions-nous. Le voilà à ces mots qui se serre qui tire là vers le bas comme si las de s’accrocher aux côtes il voulait se laisser choir tel un gros caillou, tel du haut du ciel un grand oiseau noir comme moi ce soir je me laisse couler dans un trou de mots creusés dans ma banquise reposoir. N’est pas froide ma solitude ni effrayante cette infinité blanche sans visages familiers sans des bras d’homme pour m’aimer. Je suis seule en moi. Pour une fois la première j’ai le choix je suis libre je fais sauter à loisir points et virgules seule dans ma banquise je joue je déjoue ma vie dans tous les sens attrape qui peut attrape qui veut et qui m’aime me suive dans ma nuit boréale je délie toutes mes lyres je glisse lisse délice délire. A loisir à désir je peuple mes immaculés horizons d’amours fugitives je m’invente des cartes du Tendre des feux de bois des brasiers dans le bas ventre je ressuscite les fantômes du passé leur invente des voix chaudes et sans rides. Libre enfin ? De qui de quoi ? De lui Pharaon-Le Père qui ne savait pas l’amour ni les mots de tendresse ? Coulent mes mots sur mon cœur sur ma joue. Coulent sur ma vierge tristesse la paume tendre d’un inconnu qui dans son antre saura toujours m’attendre. Ce jour enfin où j’oserais lever la voix et le voile déployer mes rires et mes voiles. Rilke ! Rilke! Quand viendra-t-il donc ce temps de moi-même ?

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